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par
Tiffanny Plessis
Un libraire frustré implore le public pendant son dernier jour d’ouverture
Comme vous avez pu l’entendre, les livres électroniques et Internet ont pour objectif de brûler les bibliothèques, détruisant ainsi la civilisation, et, de façon générale, gâcher la journée de tous.
C’est peut-être un peu exagéré, mais on ne peut nier l’impact que ces technologies perturbatrices ont eu sur la façon dont nous lisons et où nous achetons nos livres.
Cela est vrai même au Japon, qui dispose pourtant d’une industrie de l’édition assez importante et d’un très grand nombre de lecteurs avides, et où les livres physiques et les magazines ont eu des chiffres de ventes élevés au 21ème siècle.
Alors que le Japon est connu pour ses avancées technologiques, les consommateurs japonais, eux, ont été lents à adopter les nouveaux modes d’achat de livres.
Tout cela est en train de changer.
Comme dans beaucoup de pays, la hausse du nombre de lecteurs de livres électroniques et de détaillants en ligne a ouvert l’accès à des livres plus nombreux et moins coûteux pour l’acheteur moyen.
Et grâce à une meilleure distribution, c’est tout au plus une question de jours, à partir du moment que vous cliquez sur « achat », pour que vos nouveaux livres sonnent à votre porte.
Même s’il s’est initialement montré résistant, il s’est avéré que la situation ne diffère plus tellement au Japon.
Amazon Japan et Rakuten ont tous les deux des lecteurs de livres électroniques et leurs livres se vendent à des prix plus bas que ceux en magasin, en particulier chez les petits détaillants, ceux de taille moyenne et dans les magasins spécialisés.
Mainichi Shinbun a récemment rapporté la fermeture de certains de ces petits magasins, insistant sur le passage des magasins de briques et de mortier aux détaillants numériques. Entre 2000 et 2013, 34% des librairies au Japon ont fermé.
Même la librairie Kaibundo de Kobe, une librairie de renommée nationale spécialisée dans les publications maritimes, a fait face à cette crise et a finalement fermé ses portes le mois dernier, 99 ans après son ouverture.
Pour le dernier jour d’ouverture de ce magasin, une foule de plusieurs centaines de personnes s’est rassemblée, attendant que les volets se ferment pour de bon. Hiroyasu Fukuoka, le gérant du magasin, se tenait à l’extérieur et a abordé les nombreuses personnes présente en leur disant : « Je vous demande à tous d’acheter vos livres dans les librairies. Si vous ne le faites pas, les librairies vont complètement disparaître de nos villes. »
En parlant avec les journalistes, le gérant du magasin a expliqué le problème en rejetant la responsabilité sur les clients. « Les gens sont impatients », a-t-il déclaré, ajoutant que les clients ne peuvent pas attendre une semaine pour qu’un livre arrive alors qu’ils pourraient l’avoir en quelques jours seulement grâce à Amazon.
M. Fukuoka a également ajouté que les librairies avaient pour habitude d’attirer les clients avec des recommandations et des conseils de qualité et en proposant des livres rares. Mais maintenant, les algorithmes de recommandations sont meilleurs en ligne et c’est donc ce que le consommateur choisi.
Même les grandes chaînes de magasins ont du mal à suivre à cause des détaillants sur Internet. Il semble que la seule façon pour les grandes chaînes comme Maruzen et Kinokuniya de rester compétitif est de maintenir d’énormes stocks de livres en magasin, même si cela peut rapidement coûter très cher. Il reste encore à voir si cette tactique est efficace ou non.
Alors que les lecteurs et les libraires passionnés se tracassent sur l’avenir des librairies, les internautes ont une attitude légèrement plus insouciante à l’égard de la situation.
« Amazon et les supérettes sont suffisamment efficaces. »
« Les librairies qui ont fermé continueront de vivre dans nos cœurs. »
« C’est la sélection naturelle. Aussi triste que cela puisse être, il faut tout simplement abandonner ! »
« J’aime les librairies pour leur atmosphère, mais quand il s’agit d’acheter des livres, je le fais en ligne. »
« Se spécialiser dans un domaine spécifique et ne pas se soucier de vendre à l’ensemble du pays en ligne n’est pas une bonne chose. Faites-en sorte que les gens puissent obtenir des livres en ligne. À l’heure actuelle, Amazon le fait, c’est pour cela qu’il gagne du terrain. »
« C’est dingue comme les propriétaires de librairies ont si peu le sens des affaires. Lisez un livre ou quelque chose d’autres et cultivez-vous un peu ! »
« Est-ce qu’ils comprennent comment fonctionne une entreprise ? Peu importe la façon dont ils se plaignent, rien ne changera. »
« Faites quelque chose pour votre réseau de distribution ! C’est beaucoup trop long de recevoir vos livres. »
« Quel est le mérite d’acheter dans une librairie ? »
« Ne vous contentez pas de pleurer devant la situation ! Donnez-nous envie d’acheter des livres dans vos magasins. Si vous ne pouvez pas, vous allez continuer à vous enfoncer et il sera normal que vos magasins ferment. »
Ces internautes sont vraiment durs ! Mais il n’est pas difficile de comprendre leur point de vue, n’est-ce pas ?
Cela dit, nous ne pouvons pas nous empêcher de nous demander s’il y a un besoin culturel et sociétal des librairies.
N’est-il pas possible qu’il y ait une justification pour subventionner cette industrie, en particulier depuis que le gouvernement japonais a subventionné les agriculteurs nationaux ? C’est difficile à dire !
Évidemment, ce n’est pas le seul problème auquel le Japon doit faire face, puisque les industries de la musique et du textile sont aussi affectées. Tant que quelque chose peut être acheté en ligne pour quelques dollars de moins, c’est ce que les clients auront tendance à acheter.
Maintenant la question à se poser est : qui peut perturber la technologie perturbatrice ?
Source: Nipponconnection.fr
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